J'ai lu "Soumission", de Michel Houellebecq

Publié le par Serge Baumann

« SOUMISSION » de Michel Houellebecq.

« J’ai acheté Soumission, le dernier roman de Michel Houellebecq, un auteur que je ne connaissais pas du tout. J’ai été impressionné par cet ouvrage qui s’inscrit visiblement dans la lignée du livre d’Eric Zemmour, « Le suicide français ».

François, le personnage du roman, est un homme très cultivé, professeur à la Sorbonne, mais dont la vie se déroule sans but, dans une atmosphère glauque à l’image de l’état d’esprit qui règne dans notre pays.

L’auteur emploie des mots crus et des descriptions qui pourraient choquer dans un autre contexte littéraire, pour décrire l’existence d’une sexualité banalement récréative, amicale parfois, certes, mais sans affect. Tout juste le personnage du roman admet-il qu‘il aurait peut-être pu développer une relation durable avec Myriam, une étudiante juive de vingt-deux ans, sa cadette de vingt-trois ans, mais ses parents l’ont emmené avec eux en Israël où elle a fini par l’oublier. Outre cette forme de sexualité vagabonde, l’alcool et le tabac complètent l’ordinaire de son quotidien vide de toute ambition malgré le haut niveau de son intellect et de sa formation universitaire.

En 2022, un président musulman est élu avec l’appui du PS et de l’UMP pour faire barrage à la représentante du FN. La transition de la laïcité vers l’islam s’effectue sans heurt, adoucie par quelques « friandises », comme la légalisation de la polygamie. François, pour retrouver son job dans les nouvelles universités musulmanes, accepte de se convertir à l’Islam.

L’histoire de cet homme est symbolique. Son haut niveau de culture qui contraste avec son absence d’ambition, rappelle le riche potentiel de développement que possède notre pays, mais dont la mise en valeur est négligée sans excuse valable. Aucun réflexe identitaire n’anime François dont la « soumission » au nouvel ordre des choses est… dans l’ordre des choses et va de soi.

La nouveauté du roman est que, contrairement à ce que l’on entend dire parfois, les risques d’une éventuelle guerre civile lors d’un passage du pays à l’Islam, sont inexistants parce que les ressorts qui l’animeraient sont déjà rompus. Dans une formulation différente, Hélène Carrère d’Encausse situe le début de la dégradation du fait identitaire, à la fin de la première guerre mondiale. Pour ma part, je la fait remonter bien avant, à la révolution de 1789.

A l’époque révolutionnaire de 1789, quand l’identité historique de la nation était animée d’un idéal monarchique, la France était forte et respectée. Cette identité avait pris naissance avec le baptême de Clovis (à l’origine du prénom « Louis »), et s’incarnait dans la personne du roi sacré par un représentant sur terre, du Dieu des chrétiens. Les privilèges dont bénéficiait alors l’aristocratie, étaient le prix que le peuple consentait à payer depuis longtemps, pour assurer l’unité du pays et sa sécurité, ainsi qu’en témoignent les spectaculaires victoires des armées révolutionnaires et napoléoniennes. Mais après la calamiteuse campagne de Russie et la défaite de Waterloo, le réflexe identitaire régressera si rapidement que les trois guerres suivantes auxquelles le pays va devoir faire face contre l’Allemagne, seront désastreuses.

L’idéal monarchique subsistera encore pendant quelques générations, comme en témoignent les prénoms de rois donnés massivement aux enfants jusqu’à la fin du XIXème siècle, avant de disparaître au profit de l’idéal républicain, lequel à son tour, perdra son dernier lien historique après la deuxième guerre mondiale, d’abord par un délaissement de la pratique religieuse qui laisse place à la dispersion des esprits, et, plus récemment, par la liberté laissée aux parents, de donner à leurs enfants des prénoms inexistants dans le calendrier des saints.

Michel Houllebecq serait-il un visionnaire ? Je devrai attendre huit longues années pour le savoir.

Si Dieu le veut ! »

À LAON, le 27 janvier 2015

Serge BAUMANN

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